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Les Kurdes, en colère, enterrent les victimes d'un raid aérien


Vendredi 30 decembre 2011 à 15h15

GÜLYAZI (Turquie), 30 déc 2011 (AFP) — Des milliers de Kurdes courroucés ont enterré vendredi dans le Sud-Est anatolien 35 civils tués mercredi soir par erreur au cours d'un raid aérien turc et ont conspué le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, le qualifiant de meurtrier.

La foule endeuillée a accompagné dans un long convoi de voitures et d'ambulances les cercueils des victimes du bombardement depuis la bourgade d'Uludere, où les corps ont été autopsiés et où un service funèbre a été célébré à la mosquée, jusqu'au cimetière du village de Gülyazi, près de la frontière irakienne.

Après le défilé des véhicules, au son des avertisseurs, les chauffeurs faisant le V de la victoire, l'assemblée funèbre a scandé "Erdogan est un assassin".

"C'était une jeune pousse, nous n'avons pas pu la cultiver", se lamente la mère de Vedat Encu, âgé de 13 ans.

"Je veux dire au chef d'état-major que mon fils est un martyr et qu'il ne portait aucune arme", hurle le père de l'adolescent, alors que le corps est porté en terre.

M. Erdogan a présenté vendredi ses condoléances aux familles des victimes, évoquant un incident "malheureux et affligeant".

"Selon les images (de drones) un groupe de 40 personnes se trouvait dans la zone. Impossible de dire de qui il s'agissait (...) Après, il a été déterminé qu'il s'agissait de contrebandiers transportant des cigarettes, et du carburant à dos de mules", a-t-il expliqué, assurant qu'"aucun Etat ne bombarde son peuple délibérément".

M. Erdogan a également tenté de justifier le raid mené par des F-16 par le fait que dans le passé des rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), visés par le raid, empruntaient le même chemin avec des mules pour le transport de leurs armes afin d'attaquer des postes militaires à la frontière irakienne.

A Gülyazi, ces explications ne convainquent pas.

"Il est impossible qu'il aient été tués par erreur. Les soldats étaient à 150 mètres de là et à portée de vue", a déclaré Mehmet, 20 ans, du village d'Ortasu, d'où étaient originaires avec celui de Gülyazi la plupart des victimes.

"J'aurais pu être une des (victimes)", ajoute le jeune homme, qui admet vivre de la contrebande avec l'Irak.

Une jeune femme est en pleurs après la mort d'un de ses cousins.

"Ce n'était pas une erreur. Ils ont tué volontairement des gens qui s'efforçaient de gagner leur croûte", accuse-t-elle.

L'armée turque, qui bombarde régulièrement les repaires du PKK dans le Kurdistan irakien, fait face depuis l'été à une flambée de violence des rebelles qui utilisent leur bases arrières en Irak pour lancer des attaques contre des objectifs dans le Sud-Est anatolien, peuplé en majorité de Kurdes.

Le PKK, considéré comme une organisation terroriste par de nombreux pays, a pris les armes en 1984 et le conflit a fait au moins 45.000 morts.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.